Intégration des réfugiés : comment faire rimer solidarité avec prospérité ?
27,1 millions. Selon les Nations Unies, c’est le nombre de réfugiés que comptait le monde en 2021. La France représente depuis de nombreuses années un des principaux pays d’accueil : avec plus de 90 000 nouvelles demandes d’asile enregistrées en 2021, elle se place même au cinquième rang mondial derrière les États-Unis, l’Allemagne, le Mexique et le Costa Rica.
La question de l’intégration des réfugiés est revenue sur le devant de la scène suite au déclenchement de la guerre en Ukraine qui a conduit plus de 7 millions de personnes à fuir leur pays devant l’offensive russe. Elle occupe également l’actualité politique depuis quelques mois avec le projet de loi « Asile et immigration » qui prévoit notamment de faciliter l’accès des demandeurs d’asile au marché du travail avec pour objectif de répondre à la problématique des métiers en tension.
Ce débat reste cependant clivant et est souvent réduit à la question du coût de l’accueil des réfugiés. Pourtant, la plupart des travaux de recherche démontrent l’impact positif de leur intégration sur une économie.
Un impact socio-économique positif
Dans un article publié fin 2021, le Conseil d’analyse économique (CAE) montre que les recettes fiscales générées par les réfugiés à travers leur travail ou leur consommation sont nettement supérieures aux dépenses liées à leur accueil. On observe également un effet dynamisant sur les échanges commerciaux car les réfugiés ont tendance à tisser des liens économiques avec leur pays d’origine et soutiennent ainsi les exportations. L’impact socio-économique à long terme est clairement bénéfique.
« La plupart des travaux de recherche démontrent l’impact positif de l’intégration des réfugiés sur une économie »
L’analyse des effets de l’intégration des réfugiés sur le marché du travail est plus difficile à déterminer mais des études menées aux États-Unis, en Allemagne ou en Suède dans des contextes d’afflux massifs de réfugiés sur une période très courte (exode des Cubains vers la Floride au début des années 1980, crise des réfugiés Syriens en 2015) démontrent également un impact positif. Une enquête réalisée par l’agence pour l’emploi allemande montre par exemple que cinq ans après l’accueil de plus d’un million de réfugiés syriens, le bilan en termes d’intégration sur le marché de l’emploi est sans appel : environ la moitié des réfugiés étaient en emploi et plus de la moitié d’entre eux occupaient des emplois spécialisés ou nécessitant un niveau de qualification élevé.
Un engagement nécessaire des entreprises et de la société civile
Une des clefs de la réussite de l’intégration des réfugiés syriens en Allemagne a été le rôle actif joué par les entreprises, qui se sont massivement mobilisées pour former les réfugiés à la fois sur les aspects techniques et linguistiques. Pour ces entreprises, l’embauche de personnes réfugiées présente plusieurs avantages : outre le fait qu’elle peut leur permette de répondre à des difficultés de recrutement, elle offre aussi la possibilité d’agir concrètement en faveur de la diversité des talents et des profils au sein des équipes et d’enrichir la culture d’entreprise. Elle est aussi un bon moyen de renforcer sa marque employeur en proposant une approche innovante et responsable de la gestion des talents.
En France, de nombreuses initiatives émergentes démontrent la capacité des entreprises à faire du défi de l’intégration des réfugiés une source de création de valeur. On peut citer notamment la création de la coalition « Each one for tomorrow », qui regroupe une vingtaine de grands groupes français et européens (Carrefour, Generali, BNP Paribas, Naturalia, etc.) souhaitant s’investir aux côtés des pouvoirs publics et de la société civile pour faciliter le recrutement de personnes réfugiées. Ils se sont fixé pour objectif de recruter 10 000 personnes réfugiées à horizon de deux ans.
Ces entreprises ne se cantonnent pas à agir pour l’inclusion des réfugiés d’un point de vue économique en favorisant leur employabilité, elles sont aussi pour la plupart signataires de la Charte de l’inclusion des personnes réfugiées et exilées en entreprise – porté par le cabinet Utopies et l’ONG Singa – pour les accompagner sur le champ social, en développant une culture d’inclusivité dans l’entreprise.
« Les initiatives mises en place montrent qu’il est possible de créer de la valeur au bénéfice d’un secteur ou d’un bassin d’emploi tout en répondant à des problématiques de diversité et d’inclusion »