ChatGPT va-t-il vous voler votre travail ?

Avec le lancement en grande pompe de son intelligence artificielle générative, la société OpenAI a relancé le débat ancien de l’impact du progrès technique sur l’emploi. La crainte viendrait cette fois-ci du fait que la technologie serait désormais capable de remplacer des professionnels hautement qualifiés. Analystes financiers, développeurs, journalistes, enseignants… ces métiers sont-ils vraiment menacés par des robots aux qualités intellectuelles surhumaines ?

Progrès et « chômage technologique », une peur ancienne

L’idée selon laquelle la technologie détruirait plus d’emplois qu’elle n’en produit n’est pas nouvelle. Tisserands hollandais, luddites anglais, canuts lyonnais… l’histoire de la révolution industrielle est parsemée de révoltes d’ouvriers qui voyaient d’un mauvais œil l’apparition de machines dans les usines dès la fin du XVIIIème siècle.

Beaucoup plus proche de nous, une étude publiée en 2013 par deux chercheurs de l’université d’Oxford, Carl Benedikt Frey et Michael Osborne, jetait un pavé dans la mare en estimant que 47% des emplois américains risquaient d’être remplacés par des machines en l’espace d’une à deux décennies. Pour la France, le cabinet Roland Berger parvenait à un résultat plus inquiétant encore en prédisant que deux emplois sur cinq pourraient disparaître du fait de la diffusion des technologies numériques.

Une réalité plus nuancée

Dix ans plus tard, force est de constater que l’apocalypse qui nous était promise ne s’est pas réalisée. Les méthodologies utilisées par ces études sont aujourd’hui remises en cause. Elles partent du principe qu’un métier peut être automatisé si plus de 70% des tâches qui le composent sont répétitives. Or, un métier n’est pas une simple addition de tâches, il s’insère le plus souvent dans des organisations du travail globales qui supposent des compétences et des interactions sociales que les machines sont aujourd’hui incapables de mener.

Une évolution technologique peut aussi être possible mais pas souhaitable ni souhaitée par la société. Selon l’étude de Frey et Osborne citée précédemment, le métier de mannequin présenterait un des plus forts risques d’automatisation. Certes, marcher sur un podium constitue en soi une tâche parfaitement automatisable mais qui peut imaginer voir des robots défiler pour des maisons de haute couture ou poser en couverture d’un magazine de mode ? Un autre exemple moins caricatural est celui des caisses automatiques de supermarchés qui auraient pu faire totalement disparaître le métier de caissier. Or, ces emplois subsistent encore ce qui vient confirmer le fait que tout emploi automatisable n’est pas voué à une disparition certaine.

Vers la création de nouveaux métiers mais surtout l’évolution de ceux existants

Comme pour toutes les autres ruptures technologiques, la diffusion de l’intelligence artificielle dans nos sociétés va conduire à des destructions d’emploi mais également à la création de nouveaux métiers. On parle déjà de l’apparition d’éthiciens de l’intelligence artificielle dont le rôle sera de décider comment un ordinateur devra se comporter face à un problème éthique, comme par exemple le choix que devra faire une voiture autonome lorsqu’elle sera confrontée à un accident inévitable.

Le plus gros des bouleversements viendra cependant de l’évolution des métiers existants et nécessitera donc une adaptation des compétences des salariés. Les outils d’intelligence artificielle comme ChatGPT auront par exemple un impact significatif sur le métier de développeur informatique : ces derniers passeront moins de temps à écrire des lignes de code, des tâches simples et répétitives dans lesquelles ChatGPT excelle, mais davantage à contrôler ou à adapter celles rédigées automatiquement par l’outil. Le temps libéré sera alors dédié à des missions qui nécessitent de l’analyse et de la réflexion plus profondes. L’activité d’un développeur informatique est en effet bien plus vaste que de créer du code décorrélé de tout contexte.

Face à la rapidité et l’ampleur des changements, le défi majeur réside donc dans l’adaptation des systèmes de formation initiale et continue pour permettre aux salariés de faire évoluer leurs compétences tout au long de la vie et ainsi ne pas se laisser distancer par les évolutions de l’IA. Une nouvelle réalité qui nécessitera une implication de tous (éducation nationale, acteur de la formation continue, entreprises, etc.) pour s’assurer que les métiers puissent se réinventer et faire de ses évolutions technologiques un levier de compétitivité.

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